Marie-France PÉRÈS, genèse de ce récit
Tant de morts, tant de veuves, tant de guerres ! Je commençais ainsi mon récit dans le livre « Si mon père et ma mère avait été là ». C’était il y a quinze ans et certaines personnes de mon entourage s’étonnaient que, à soixante-dix ans, je m’attarde sur ces souvenirs de petite bretonne qui a perdu son papa en 1944 : C’est le passé me disait-on ! Et bien oui, il faut raconter encore et encore.
Ce Passé n’est pas du Passé. Je pourrais vivre sereinement ici au bout de ma Bretagne mais les guerres qui meurtrissent le monde m’y rejoignent. Je me sens en fraternité avec tant d’enfants meurtris, particulièrement depuis ces 15 ans, partout dans le monde. Et maintenant dans le grand âge, puisque qu’aucune action n’est à ma portée, c’est en militante que je partage mon récit.
Mon récit est celui d’une petite famille amputée. Il était impossible de dissocier mon statut d’orpheline du veuvage de ma mère. Il faut du temps pour comprendre et surmonter les fragilités. Cette épreuve m’a obligée à fourbir mes armes et malgré mes larmes d’enfants, malgré l’absence, elle fut ma force. Il faut aussi compter sur l’amour, celui qu’on reçoit et celui qu’on partage. C’est pourquoi, ma devise restera jusqu’au bout « Regarde Devant ». Quand on connaît le prix de la Vie on se doit de puiser en soi pour partager optimisme et espoir. Malgré le monde en guerre, malgré deuils ou maladies, contre vents et marées et … tempêtes bretonnes.
Locmaria-Plouzané, 21 janvier 2024