Il y a 225 ans : le début de la fin pour l’esclavage ?
Le 16 pluviôse an II (4 février 1794), l’assemblée de la Convention vote, dans l’enthousiasme général, l’abolition de l’esclavage dans les colonies françaises. Le texte énonce notamment : « La Convention déclare l’esclavage des nègres aboli dans toutes les colonies ; en conséquence, elle décrète que tous les hommes, sans distinction de couleur, domiciliés dans les colonies, sont citoyens français, et jouiront de tous les droits assurés par la Constitution. »
Cette abolition intervient quatre ans et demi après la nuit du 4 août 1789 qui a mis fin aux privilèges féodaux et au sujet desquels le duc François de La Rochefoucauld-Liancourt (1747-1827) envisageait d’étendre aux esclaves le principe d’égalité devant la loi. Mais les intentions du duc restent à l’état d’idée et de leurre. La Révolution ne prend pas d’emblée position en faveur de l’abolition de l’esclavage En ces temps troublés, les intérêts financiers continuent de primer sur le sort des 450.000 personnes constituant une main-d’œuvre gratuite, largement exploitée dans les plantations sucrières. Les colonies constituent une ressource économique de premier plan dont le nouveau régime ne doit pas se priver. Les pressions sont fortes sur les gouvernants de la Première République. Ainsi, les représentants des colonies menacent de se séparer de la métropole si l’on abroge l’esclavage et, le 28 mars 1792, l’Assemblée législative se contente d’établir une égalité de droit entre tous les hommes libres à l’exception des esclaves.
Ces derniers finissent par se révolter en Guadeloupe, tout d’abord, dans la nuit du 20 au 21 avril 1793. À Trois-Rivières, l’esclave Jean-Baptiste et 243 autres esclaves tuent une vingtaine de Blancs. Ensuite, le 7 juillet, une poignée d’aristocrates sont tués au fort Saint-Charles et une révolte de 1.200 esclaves, fin août 1793, se termine en bain de sang. Les affranchis et esclaves de Saint-Domingue (aujourd’hui Haïti) se soulèvent à leur tour, fin août-début septembre 1793. Une autre menace surgit : la possible invasion de Saint-Domingue par les Anglais. Le commissaire de Saint-Domingue, Léger-Félicité Sonthonax (1763-1813), décide de libérer et armer les esclaves pour en faire des soldats et, ainsi, sauver la colonie de l’invasion anglaise.
C’est notamment dans ce contexte qu’est signé le décret du 4 février. Il est appliqué à Saint-Domingue, en Guyane et en Guadeloupe, mais pas en Martinique ni à Tobago, alors occupées par les Britanniques. Il n’est pas appliqué, non plus, aux Mascareignes (La Réunion et l’Île-de-France*) car l’administration locale refuse de l’appliquer ! En 1802, Bonaparte décide de ne pas appliquer le décret de 1794 aux territoires récemment restitués par l’Angleterre via le traité d’Amiens. En 1815, pendant les Cent Jours, Napoléon décrète l’abolition de la traite négrière, décision confirmée par le traité de Paris en novembre 1815. Mais cette décision ne trouve aucun écho dans la réalité. Il faut attendre le décret du 27 avril 1848, pris sous l’impulsion de Victor Schœlcher, pour voir l’esclavage totalement aboli sur l’ensemble du territoire français.
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