Simcha Rotem : dernier combattant du ghetto de Varsovie
Il avait 94 ans et s’est éteint le 22 décembre dans la ville de Jérusalem, où il avait pris une retraite paisible, il y a quelques décennies. Simcha Rotem, dont le nom reste inconnu du grand public, était pourtant l’ultime survivant des combats du ghetto de Varsovie. Né dans cette ville le 10 février 1924, Simcha Rotem, né Simha (Szymon) Rathajzer, a 18 ans quand débute La Grande Action, c’est-à-dire l’opération de liquidation du ghetto de la capitale polonaise qui compte près d’un demi-million de personnes.
Sur ordre du Reichsführer SS, Heinrich Himmler (1900-1945), les troupes nationales-socialistes commencent à rassembler les populations juives sur Umschlagplatz (1) et à les déporter vers le camp d’extermination de Treblinka, situé à 80 kilomètres à l’est de Varsovie. L’opération commence le 23 juillet 1942. Mais quelques jours plus tard, les premiers fugitifs de ce camp de la mort reviennent à Varsovie et témoignent de la vérité. Il ne s’agit pas de réinstaller les Juifs de Varsovie mais bel et bien de les exterminer.
Deux organisations de résistance voient alors le jour au sein du ghetto : l’Union militaire juive (2) et l’Organisation juive de combat (3) à laquelle appartient le jeune Simcha Rotem en qualité d’estafette, c’est-à-dire de messager. En janvier 1943, alors que les autorités allemandes décident d’accélérer les déportations, les deux groupes parviennent, à la faveur de rudes combats, à empêcher de nouvelles vagues de déportation. Presque un mois plus tard, le 16 février 1943, Heinrich Himmler ordonne la destruction complète du ghetto de Varsovie. Les 2.000 policiers et SS, avec leurs chars, des lance-flammes et de nombreuses pièces d’artillerie, se heurtent aux deux organisations de résistance juive. La révolte, ou soulèvement, du ghetto de Varsovie se déroule du 19 avril au 16 mai 1943. La résistance polonaise fournit quelques hommes et des armes. Simcha Rotem participe activement aux combats et parvient à sauver de nombreuses familles juives, parmi lesquelles ses parents, en les faisant s’échapper par les égouts. Son physique (il est blond aux yeux bleus) lui permet également de passer inaperçu dans le reste de la population varsovienne.
Pendant ce soulèvement, environ 7.000 résidents du ghetto sont tués et 6.000 autres sont brûlés vifs ou gazés pendant la destruction de leur quartier. Les survivants sont déportés dans les camps de Treblinka, Majdanek, Poniatowa et Trawniki. Simcha Rotem, qui porte le nom de guerre « Kazik » (4), parvient à s’échapper. Il participe ensuite à l’insurrection de Varsovie, en août 1944, aux côtés des résistants polonais. Après-guerre, il concourt à l’organisation Beriha, qui aide les Juifs européens à immigrer en Israël. Il tente aussi d’échafauder un plan d’empoisonnement massif des SS détenus par les Américains en Pologne mais son plan échouera. Il émigre lui-même en Israël en 1947.
Le nombre de ceux qui peuvent témoigner des horreurs des camps de la mort et des combats de la Seconde Guerre mondiale se tarit au fil des années. Ainsi, à ce jour, il ne reste que cinq Compagnons de la Libération : Guy Charmot (104 ans), Edgard Tupët-Thomé (98 ans), Hubert Germain (98 ans), Daniel Cordier (98 ans) et Pierre Simonet, 97 ans.
1 : Place de transbordement en français.
2 : Żydowski Związek Wojskowy, ŻZW
3 : Żydowska Organizacja Bojowa, ŻOB
4 : Abréviation de Kazimierz (Casimir), Kazik signifie « quelqu’un qui détruit le prestige de l’adversaire au cours de la bataille ».
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