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  Le train fantôme de 1944

 

57 jours de trajet au lieu des 3 habituels pour aller de Toulouse à DACHAU, c’est beaucoup pour l’époque, c’est pourtant ce qui est arrivé du 3 juillet au 28 Août 1944 à 750 déportés, dont 60 femmes, une majorité d’espagnols, des juifs étrangers et des résistants (Bir-Hakheim, FTP-MOI, OCM etc.) tous livrés par la police Française.

Quelques jours avant, le 30 Juin, au camp du Vernet (Ariège) à 25 km environ de Toulouse, sous emprise de la 3 éme compagnie allemande depuis le 10 de ce même mois, 398 hommes et 5 femmes montent dans des camions ou autobus. Ce convoi part pour la caserne Caffarelli de TOULOUSE en ayant pris au passage quelques détenus du camp de Noë (Haute Garonne).

Le 2 juillet, ces 403 détenus partent à la gare de marchandises Raynal de Toulouse. Arrivés sur place on les fait monter, ainsi que 150 autres tirés de la prison Saint Michel, dans les wagons d’un train spécial. Ce dernier doit rejoindre Paris via Angoulême.

Dans la gare Léon AURIOL, jeune cheminot de 17 ans et un de ses collègues sont intrigués par des bruits provenant de ce train et de mains qui s’agitent par les faibles ouvertures, mais vite ils réalisent que ces hommes, prisonniers, réclament de l’eau. Voulant intervenir ils sont chassés aux cris de « Raüs » par les soldats. 150 hommes gardent le convoi, certains installés sur une plate-forme équipée d’une mitrailleuse. Ils remarquent aussi que sur les wagons l’inscription « chevaux 8, hommes 40 » est devenue « chevaux 8, hommes 70 », modifiée à la craie. Les 4 ouvertures sont condamnées. Dans ce train et le même wagon sont montés les 2 frères LEVY, Raymond 19 ans et Claude 17 ans, entrés en résistance à Toulouse en 1943, internés à la prison Saint Michel, de Toulouse.

Le chef de convoi est «  l’Oberlieutenant » BAÜMGARTNER.

Personne à Toulouse n’a remarqué ces inhabituels mouvements de camion de la caserne Caffarelli vers la gare Raynal. Peut-être parce que la libération est en route ou que la Whermacht s’en va.

Le 3 Juillet donc, le train, 30 wagons, se met en route à 18 h direction Bordeaux puis Angoulême. Dans cette gare, arrêt obligé du convoi, les résistants ont saboté les voies et l’aviation alliée a bombardé la gare  qui est pratiquement détruite. Les cheminots ont appliqué le plan vert qui consiste à retarder le plus possible la remontée des troupes allemandes vers la Normandie.

4 juillet : gare de PARCOUL-MEDILLAC (Charente) où le train stationne toute la journée, l’arrivée de 5 chasseurs US, P38, jette la panique dans le convoi qui est mitraillé ou bombardé, les pilotes en ignorant le contenu. Des blessés et des morts des deux côtés. Raymond LEVY récupère un chiffon blanc et l’agite par une ouverture espérant qu’un pilote l’apercevra. Enfin, les avions s’éloignent, sont-ils à court de munitions ou ont-ils compris le signal ?

 

Quatre hommes seront fusillés pour tentative d’évasion.

8 Juillet : Que faire ? Baumgartner furieux ordonne de repartir vers Bordeaux où il prendra une décision.

 9 juillet : arrivée du train qui stationne sur une voie secondaire, mais les détenus vont rester dans le train jusqu’au 11 Juillet.

Christian de Roquemaurel, à l’origine du maquis de Bir-Hakheim, tentera de s’évader sans succès.

12 Juillet : tout le monde descend et doit rejoindre, qui la synagogue : les hommes, qui la caserne BOUDET rue Lauribart : les femmes.

8 août : on remonte dans le train, appel par ordre alphabétique pour certains, et 150 détenus du Fort du Hâ s’y ajoutent. Des hommes résistent, sont fusillés sur place, dont un professeur de philosophie de la FAC de TOULOUSE : Albert LAUTMAN.

10 Août : le convoi repart à 8 h mais cette fois vers la vallée du Rhône ainsi en a décidé Her Oberlieutenant BAÜMGARTNER.

13 Août : entrée en gare de Remoulins où le convoi stationne jusqu’au 17 sous une forte chaleur rendant les conditions de vie des détenus difficilement supportables. Une dame, Marie DIAMANI, résistante du maquis « Libération », voisine de la voie ferrée intervient pour aider les détenus qu’elle a entrevus quémander. Mais les soldats allemands lui disent que seule la Croix Rouge est autorisée à le faire. Mme DIAMANI va, à pied, se rendre à Nîmes, elle y rencontre le Général MICHEL qui lui délivre un document l’autorisant à utiliser les moyens de la Croix Rouge., ce qu’elle fait à son retour. Les détenus sont en partie soulagés et réconfortés momentanément.

17 Août : minuit, départ du train, bien que des allemands voulaient réquisitionner ce train en leur faveur, pour rentrer chez eux, le débarquement en Provence ayant eu lieu, les alliés largué des tracts, la situation devenait urgente, un « sauve qui peut en somme ». Cinq détenus vont pouvoir s’échapper, un cheminot Louis DELVAUX a mal verrouillé les portes, quel distrait cet homme !!

18 : Août : ROQUEMAURE et SORGUES.

Un changement de train obligé, mitraillage de ce dernier à PIERRELATE et locomotive hors de fonction, entraîne une marche de 17 km sous une chaleur torride, de Roquemaure à Sorgues. Pendant la traversée de Châteauneuf du Pape la population ravitaille tout ces malheureux dont certains chantent la Marseillaise.

19 Août : MONTÉLIMAR.

Madame VIALA de la Croix Rouge intervient mais les autorités allemandes ne veulent que se débarrasser des cadavres, la dame insiste et obtient gain de cause pour soigner aussi les blessés.

 20  Août : matin LIVRON-LORIOL

Transbordement dans un autre train à pied avec traversée de la Drôme sur des planches, le pont étant détruit. Quatre évadés pendant ce temps.

Le train repart dans l’après-midi.

20 Août : après-midi VALENCE

Arrêt pour ravitaillement en eau pour ….. la locomotive. Nouveau départ à 16 h.

22 Août : PONT de l’ISERE puis LYON

Arrivée à 22 h.

23 Août : vers 6 h départ de LYON.

24 Août : DIJON.  Quelque 70  détenus vont s’évader grâce aux cheminots complices pour se réfugier chez les habitants proches dans un 1er temps, puis après rejoindre le maquis pour certains.

25 Août : les frères LEVY s’échappent aussi par le plancher des wagons. Certains utilisaient une technique spéciale pour fragiliser le plancher : uriner dessus jusqu’à effritement, une solution en vaut une autre, comme utiliser un clou pour effriter le pourtour des boulons, surtout si elle est efficace.

27 Août : SARREBRÜCK  ,    après passage à Nancy, Pont à Mousson et Metz.

28 Août : DACHAU : terminus à la nuit tombée.

Seront immatriculés : 536 détenus dont 63 femmes, (sur les 750 au départ), la moitié d’entre eux ne reviendront pas.

 

Quelques précisions :

Pendant le trajet les détenus étaient divisés en 2 camps : ceux pour l’évasion, ceux contre pour éviter les représailles possibles.

Un cheminot, un mois après le passage du train à AGEN, trouva un mot « prière de prévenir Madame…B » ce qui sera fait.

Les cheminots ont grandement participé aux évasions, utilisant divers subterfuges comme donner leur casquette pour se fondre dans la masse.

La transpiration dans les wagons se condensait sur les parois et était récupérée comme boisson.

Depuis 1942 ce sont 80 trains, 140 000 déportés qui ont ainsi circulé sur les voies SNCF avec une destination finale, fatale pour beaucoup.

Pas d’interventions des groupes de résistants : d’une part ils ne savaient et d’autre part ils étaient engagés sur d’autres opérations.

Et enfin pas de trace de BAUMGARTNER après la guerre !

                       Train fantôme car on ne savait pas où il était où il allait.

 

Sources : divers sites internet dont les 2 ci-après très détaillés, à consulter :

1°) affaires sensibles du 11 Décembre 2020 par Fabrice DROUELLE. (audio France inter).

   2°) site de l’amicale du train fantôme : « lesdeportesdutrainfantome.org » à découvrir.

 cliquez ici –>  http://lesdeportesdutrainfantome.org

 

NDLR : comme tout souvenir lointain, les chiffres ou faits récupérés peuvent varier à moins qu’ils n’aient été écrits.

 

 

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