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Témoignage malgré nous[vc_row][vc_column][vc_column_text]« Malgré-Nous »
 
  
L’INCORPORATION DE FORCE
 
Le terme « Malgré-Nous » définit les Alsaciens-Mosellans qui ont été incorporés de force dans l’armée régulière allemande (la Wehrmacht) ou dans la branche militaire de la SS (la Waffen-SS), durant le Seconde Guerre mondiale.
La campagne de recrutement de volontaires pour la Wehrmacht est un échec, même si la propagande se charge de camoufler la maigreur des effectifs ainsi recrutés. Cet échec conduit le Gauleiter Robert Wagner à demander à Hitler l’introduction du service militaire obligatoire , en présence de deux autres Gauleiter, Bürckel pour la Moselle et Gustav Simon pour le Luxembourg. Hitler donne son consentement pour la mise en œuvre de cette mesure.
Le 23 août 1942 paraît le « Décret du Ministère de l’Intérieur du Reich sur la nationalité en Alsace, en Lorraine et au Luxembourg », accordant la nationalité allemande aux habitants de ces régions : sont considérés comme Allemands les personnes de souche allemande, c’est-à-dire dont les deux grands parents sont allemands, sont nés en Alsace et en Lorraine ou ailleurs dans le Reich.
Le 25 août 1942 pour l’Alsace et le 29 pour la Moselle sont publiées les ordonnances sur le service militaire obligatoire dans l’armée allemande pour les Alsaciens-Mosellans.
« En vertu des pouvoirs qui m’ont été conférés par le Führer, j’ordonne :
1°- Le service militaire obligatoire dans l’armée allemande est introduit pour les jeunes gens de race allemande en Alsace appartenant à des classes qui seront déterminées par une ordonnance spéciale.
2°- Les hommes appelés sous les drapeaux seront soumis aux mêmes prescriptions en vigueur que les soldats allemands, ils jouissent aussi des mêmes droits que ceux-ci.
3°- Les hommes soumis à l’obligation militaire, mais non appelés au service actif dans l’armée sont soumis aux prescriptions en vigueur pour cette catégorie.
4°- Cette ordonnance entre en vigueur le 25 août 1942.
 
Ce décret est totalement contraire à toutes les lois internationales, car la convention de La Haye du 18 octobre 1907 concernant les lois et coutumes de la guerre sur terre, contient une disposition visant à codifier les droits de l’occupant sur la population occupée. Elle stipule qu’un droit de réquisition au profit de l’occupant est prévu dans les articles 52 et 56, mais « qu’il est également interdit à un belligérant de forcer les nationaux de la partie adverse à prendre part aux opérations de guerre dirigées contre leur pays » (article 23 alinéa 2).
Naturellement, Vichy proteste, mollement et sans effets.
Cette incorporation de force ne se passe pas sans mal : elle implique de devoir laisser sa vie pour un pays qui n’est pas le sien.
De très nombreuses manifestations se produisent lors des départs des jeunes vers les conseils de révision, des incidents de plus en plus violents se multiplient, des passages clandestins de frontières, concernant quelquefois de groupes très importants qui se terminent par des échanges de coups de feu, des arrestations, des morts, puis courant février 1943, par les premiers jugements et les premières exécutions, qui ont lieu au Struthof, le premier camp de concentration français qui vient d’entrer en service.
Pour stopper cette hémorragie, Wagner décrète le 1er octobre 1943, une ordonnance consacrant la responsabilité collective de la famille en cas de défaillance d’un appelé : transplantation en Pologne et en Silésie, confiscation des biens, comparution devant le « Sondergericht » (Tribunal d’exception), tel est le sort aux parents et à la famille d’un jeune sui se soustrait à l’ordre d’appel dans la Wehrmacht, sans compter les travaux forcés pour les parents qui n’auraient pas dénoncé leurs propres enfants. Même incorporés, certains furent fusillés dans leur unité pour rébellion.
La répression extrêmement brutale qui frappe tous ceux qui se sont opposés à l’incorporation de force et les mesures de transplantation prises à l’égard des familles des réfractaires incitent la plupart des « Malgré-Nous » à répondre à l’ordre d’appel. Mais beaucoup d’entre eux partent avec le secret espoir de passer les lignes alliées à la première occasion.
Environ 100 000 Alsaciens et 30 000 Mosellans et 10 000 Luxembourgeois furent incorporés de force. Ces effectifs forment l’équivalent de plus de dix divisions, ce qui est loin d’être négligeable.
En général, les incorporés de force sont dispersés par petits groupes dans les unités combattantes d’Allemands nationaux. Dans une telle situation, le dilemme des Incorporés de Force devient tragique : souvent ils n’ont d’autre choix que de combattre, car la désertion signifie la mort : repris, ils sont fusillés sur le champ par les Allemands ; pris par les Soviétiques, ils sont soit fusillés car considérés comme traitres français, soit internés dans des camps de concentration dont le plus sinistre est celui de Tambow.
Sur les 130 000 incorporés de force Alsaciens et mosellans, environ 88 000 vont revenir au pays. 42500 sont morts, dont près de 32 000 Alsaciens. 40 000 ont été blessés. Parmi les morts, 22 000 sont morts dans l’armée Allemande, les autres sous les balles de l’armée rouge, immédiatement fusillés, ou dans divers camps soviétiques.
Le nombre de tués sur le front augmenta notablement à partir de l’été 1944. A la fin du conflit, le bilan sera encore plus lourd, en raison de la violence des derniers combats et des conditions de détention extrêmement dures, dans les camps de prisonniers soviétiques.
Le nombre des évadés de la Wehrmacht est particulièrement impressionnant. Plus de 15% des Alsaciens qui ont été incorporés de force ont déserté d’une manière ou d’une autre. Si on y rajoute les réfractaires, on constate que près du quart des effectifs concernés par l’obligation militaire sous toutes ses formes s’est soustrait à la Wehrmacht, ce qui constitue incontestablement un record.
« Le Incorporés de Force d’Alsace et de Moselle se trouvèrent du mauvais côté et ne purent donner de sens à leur combat » (Alfred Wahl, introduction du colloque Mémoire de la Seconde guerre Mondiale organisé à Metz les 6/8/10/1983). L’inadéquation entre la cause entre la cause de l’évènement (victimes de la conscription allemande) et de ses effets (avoir servi de chair à canon pour un pays qui n’était pas le leur) a engendré chez de nombreux incorporés de force dans l’armée allemande des séquelles psychologiques et post-traumatiques, car nombreux furent les survivants qui ne parvinrent pas à intégrer cette aventure.
Le 25 août 2017, toutes les églises d’Alsace ont été invitées à sonner le glas en mémoire de l’enrôlement de force de jeunes Alsaciens et Mosellans, à compter du 25 août 1942.

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