11 -NOVEMBRE : l’histoire compliquée du monument aux soldats morts en « OPEX »
Inauguré par Emmanuel Macron ce lundi dans le XVe arrondissement de Paris, ce lieu, qui rend hommage à 549 soldats français morts en opérations extérieures depuis 1963, a mis de longues années à voir le jour.
Par S. Co.
Le #Monument OPEX, c’est Une sculpture représentant 6 militaires (1 femme et 5 hommes), portant un cercueil non visible. Les visages expriment la douleur, le recueillement, la détermination⁰ Un mur de 37 plaques portant les noms des morts pour la France en OPEX
Enfin ! Voilà ce qu’ont sans doute dû se dire les proches de ces 549 militaires « morts pour la France » en opérations extérieures depuis 1963 lorsque l’inauguration du monument dans le parc André-Citroën a été officialisée pour ce 11 novembre 2019, en marge des cérémonies pour le 101e anniversaire de l’Armistice de la Première Guerre mondiale. Il faut dire que cela faisait huit ans qu’ils attendaient l’inauguration de ce lieu d’hommage.
Depuis octobre 2011 et la proposition du général Bernard Thorette, ancien chef d’état-major de l’Armée de Terre, les familles des soldats victimes ont en effet observé, souvent avec consternation, le projet être décrié, déplacé, repoussé…
Ce long feuilleton a pris fin avec cette inauguration par Emmanuel Macron du mémorial et de la statue du sculpteur Stéphane Vigny, qui a finalement pris place dans le parc André-Citroën, dans le XVe arrondissement de Paris. Pas de « happy end » pour autant, car ce lieu de « repli » ne satisfait pas totalement certains proches des soldats morts au combat.
Le président de la République Emmanuel Macron a inauguré à Paris le monument aux Morts pour la France en opérations extérieures en présence des familles conviées à la cérémonie.⁰
Jean-François Buil, père de Damien Buil, mort le 18 août 2008 dans l’attaque de la vallée d’Uzbin, a ainsi déclaré ce lundi matin sur Europe 1 qu’il aurait « préféré que le monument soit aux Invalides ». Comme ce qui était prévu à la base. Car, lorsque le projet d’un mémorial pour les morts en « Opex » a vu le jour en 2011, c’était pour l’installer place Vauban, à deux pas de l’Hôtel des Invalides. Tout près du tombeau de Napoléon.
Riverains en colère et délocalisation
Problème, les riverains de cette place du VIIe arrondissement de la capitale n’en voulaient pas. La raison ? Des considérations « esthétiques » et le souci de « protéger les perspectives du VIIe arrondissement et en particulier celle de l’avenue de Breteuil ». En 2013, Jeanne Villeneuve, présidente de l’association du quartier Breteuil, expliquait ainsi au Parisien : « Nous sommes courroucés car il n’y a eu aucune concertation. La place Vauban est un site prestigieux à caractère historique qui ne nous paraît pas approprié à l’érection d’un monument aux morts ».
Rachida Dati, déjà maire du VIIe, avait même écrit à Kader Arif, ministre délégué aux Anciens Combattants, pour lui dire qu’elle s’opposait elle aussi à la construction de cet édifice à cet endroit, préférant un autre lieu dans son arrondissement. Un temps évoqué, celui de la place de Fontenoy, située à quelques centaines de mètres, a lui aussi été abandonné.
La mairie de Paris ne veut plus payer
C’est donc le parc André-Citroën (XVe) qui a finalement été choisi. Mais, là encore, le monument aux soldats morts en « Opex » n’était pas au bout de ses peines. Il y a d’abord eu de longues discussions, rythmées par les tracasseries juridiques et administratives… Ainsi, comme le rappelle le site spécialisé Zone Militaire Opex360, le chantier a longtemps été bloqué, car il fallait obtenir, au nom de la propriété intellectuelle, l’accord des architectes ayant aménagé le parc André-Citröen pour y intégrer un nouveau monument.
Pire, après toutes ces procédures, la pose officielle de la première pierre du mémorial par François Hollande, prévue début 2017, a dû être repoussée de plusieurs semaines pour le mois d’avril, après le faux bond d’Anne Hidalgo. La raison officielle ? Un problème d’agenda… En filigrane, la rumeur de tensions entre la maire de Paris et Jean-Yves Le Drian, le ministre de la Défense, lui aussi socialiste, mais à qui elle reproche son soutien à Emmanuel Macron pour la présidentielle.
Autre embûche, le dossier du financement du projet, à hauteur d’1,2 million d’euros, qui a lui aussi posé problème. La mairie de Paris et le ministère des Armées avaient dans un premier temps décidé d’un financement partagé. Montage qui n’a pas survécu à l’automne 2018, puisque la municipalité a finalement décidé de ne plus mettre la main à la poche.
Dans le jardin Eugénie-Djendi, une combattante… oubliée
L’inauguration n’a donc pas lieu, comme d’abord espéré, le 11 novembre 2018 pour le centenaire de l’Armistice, mais bien un an plus tard.
Dans son discours, ce lundi, Emmanuel Macron n’a évidemment pas évoqué tous ces atermoiements, préférant une formule beaucoup plus de circonstance : « En inaugurant ce monument, j’achève un projet inspiré par Nicolas Sarkozy et poursuivi par François Hollande, dans cette continuité républicaine qui fait la force de notre nation ».
Symbole, toujours, c’est dans le jardin Eugénie-Djendi que pourront désormais se recueillir les familles des soldats. Du nom de la sous-lieutenante Eugénie Malika Manon Djendi, qui avait 20 ans quand elle s’est portée volontaire pour être parachutée en France en avril 1944. Arrêtée par la police, elle est ensuite déportée au camp de Ravensbrück avant d’y être exécutée. Un destin incroyable, pour une combattante pourtant largement oubliée par la mémoire des armées.
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