Dunkerque 1940.
Les troupes anglaises embarquent dans un grand désordre pour la Grande Bretagne, mais ils ne sont même pas tous revenus que le Haut Commandement, sous l’impulsion de Churchill, réfléchit à une contre-offensive.
Sous quelle forme ?
Une innovation se fait jour : de petits groupes armés « les commandos1 » composés de soldats d’élite pour harceler l’ennemi, récupérer des infos pour de futures actions.
Tout est à imaginer, à construire puisque le corps expéditionnaire est hors d’état de combattre après le désastre de Dunkerque.
En fait ces commandos vont utiliser les méthodes de la guérilla, en portant ça et là des coups à l’Abwer, l’obligeant ainsi à garder des troupes sur place pour combattre ce nouvel ennemi.
Avec en plus le recueil d’informations en vue du prochain débarquement allié.
C’est le Lieutenant-Colonel CLARKE, officier de l’état-major du War Office qui propose cette unité de forces spéciales.
Le 4 Juin 1940, Winston CHURCHILL ordonne la création de « spécial randy forces » ayant pour but d’harceler les allemands tout au long des côtes françaises.
Les volontaires anglais ne seront pas difficiles à recruter. Ils seront 500 hommes pour 10 commandos.
La 1 ére mission a lieu les 23 et 24 juin 1940, le commando n° 11 accoste à Boulogne, mais pas au bon endroit pour la plupart. Aucune perte mais pas d’effet.
Dans la nuit du 14 au 15 juillet, 108 hommes débarquent à Guernesey, alors occupée par les allemands. Mais là encore c’est un échec d’autant que certains sont fait prisonniers, le reste prenant un destroyer direction l’Angleterre.
Devant ces échecs Winston CHURCHILL demande à l’Amiral Sir KEYES, héros de guerre, de former ces commandos et le nomme directeur des opérations combinées. D’autant qu’Anthony EDEN, ministre des affaires étrangères, et Lord MOUNBATTEN sont contre l’idée d’un bombardement quel qu’il soit pour éviter d’innocentes pertes humaines.
Ce sera un fiasco, l’amiral très âgé, se révèle trop rigide, manque d’empathie et de communication avec les autres services. Les opérations continuent, c’est ainsi qu’en Mars 1944, six cents hommes partent d’Ecosse vers les iles LOFOTEN en Norvège. Aucune résistance allemande, plus de 200 prisonniers sont ramenés, une usine de poissons sera même détruite pendant ce raid.
Devant ces défaillances Sir KEYES est remplacé par Lord Louis MOUNBATTEN le 27 Octobre 1941. A la demande de Lord SELBORNE, ministre de la guerre l’opération FRANKTON2 est officiellement lancée, avec pour devise : frapper à l’improviste.
Objectifs : Les navires allemands basés dans le port de Bordeaux, qui transportent armes pour le Japon et en ramène notamment du caoutchouc.
Préparation : équipe de 12 hommes des Royal Marines (les Spécial Boat Service).
Ces commandos remonteront de nuit la Gironde à bord de petits kayaks. Puis arrivés sur site poseront des mines aimantées type « LIMPET », sous la ligne de flottaison des navires ancrés dans le port.
Un sous-marin, le HMS TUNA, fait surface à 15 km (9 miles) de l’embouchure, nous sommes le 7 décembre 1942.
Cinq kayaks biplaces sont mis à l’eau du côté de Montalivet Soulac : ce sont le Catfisch, le Coalfish, le Crayfisch, le Cuttlefisch et le Conguer. Un sixième, le Cachalot, malheureusement ayant sa coque trouée restera à bord.
L’opération s’avère difficile, le Conger emporté par les remous du fleuve disparaît et est englouti, le corps du marine MOFFATT est retrouvé le 17 Octobre sur une plage de l’ile de Ré, celui du Caporal SHEAR disparaît à jamais, puis le CUTTLEFISH est perdu de vue.
Les 3 kayaks restants se cachent le jour car ils ne peuvent naviguer que de nuit.
Mais comble de malheur le marine EWART et le Sergent WALLACE sur le COALFISH sont faits prisonniers à la pointe de Grave et après d’interminables interrogatoires seront exécutés à Blanquefort.
Donc ne reste que 4 hommes pour cette opération, ils arrivent sur site la 2 éme nuit du 8 au 9 Décembre, et se faufilent entre les navires ennemis. Dans la nuit du 11 au 12 Décembre, le CATFISH fixe ses mines sur 3 navires de commerce ancrés rive gauche.
L’autre kayak, le CRAYFISH pose ses mines sur 2 navires amarrés dans le môle du Verdon, du coté de Bassens.
Mission remplie, les 4 hommes quittent alors le port.
Le 12 Décembre vers 7 h les explosions se déclenchent.
Nos 4 hommes descendent la Gironde jusqu’à Saint Génies de Blaye, se débarrassent de leurs kayaks en les coulant et s’en vont effectuer plus de 150 km en zone occupée, direction RUFFEC en Charente.
Ce sera 7 jours de marche dans le froid et avec la faim à supporter. Ils se séparent et les 2 duos partent chacun de leur côté pour des questions de sécurité.
Hélas le 14 Décembre 1942 LAUER et MILLS sont arrêtés et seront, malgré leur uniforme, traités comme terroristes (non-respect de la convention de Genève) et fusillés comme tels à Paris le 23 Mars 1943, ainsi que MacKINNON er CONWAY deux autres kayakistes.
Les 2 rescapés HASLER et SPARKS seront pris en charge par la résistance. Dans un 1ertemps recueillis chez Mr PASQUEREAU à Saint Preuil (Charente). Puis ils seront hébergés dans une ferme isolée prés de Marvaux, celle d’Armand DUBREUILLE. Après 42 jours d’attente, que c’est long, ils traversent la France, via LIMOGES, LYON, PERPIGNAN, l’Espagne au consulat de Grande Bretagne à Barcelone puis Gibraltar avant de rejoindre l’Angleterre.
Bilan de l’opération : 4 cargos à TANNEFELS, DREDEN, ALABAMA et PORTLAND gravement endommagés et 2 autres dont 1 pétrolier le sont moins.
Même les pompiers y participent en larguant plus d’eau que nécessaire ce qui fait chavirer le cargo TANNEFELS et le RDEDEN qui lui va couler.
Trois seront renfloués le TANNEFELS, l’ALABAMA et le PORTLAND mais seulement au bout de quelques mois réduisant ainsi le trafic maritime des allemands.
Cela obligera ces derniers à affecter de nombreux effectifs à la surveillance des points sensibles diminuant ainsi leurs troupes au Nord de la France et face aux alliés.
Donc opération rentable pour la suite des opérations, à savoir le débarquement en Normandie.
Notes :
1°) terme venant de la guerre des boers en Afrique du Sud vers 1900.
2°) appelée aussi « coque de noix », on devine pourquoi !
NB : des zones d’ombre subsistent malgré de nombreux témoignages parfois imprécis.
Sources : revue spécialisée d’histoire.
Commentaires récents