Albert Fernand Séverin Roche né le 5 mars 1895 à Réauville dans la Drôme, est le troisième fils de cultivateurs, Séverin Roche et Louise Savel, modeste famille nombreuse.
En 1914, à 19 ans, lors de la mobilisation, le conseil de révision le refuse, car l’estimant trop chétif pour servir, à la grande joie de son père : on a besoin de bras pour faire tourner la ferme. Albert veut cependant coûte que coûte se battre. Devant l’opposition de son père, il fait son sac et se sauve. Il se présente au camp d’instruction d’Allan qui l’affecte au 30e bataillon de chasseurs. Cependant son incorporation se passe mal : mal noté, mal-aimé, il s’énerve et s’enfuit. Aussitôt rattrapé, il est envoyé en prison pour désertion.
Il se défend en ces termes : « Les mauvais soldats, on les expédie là-haut, et moi je veux aller où l’on se bat. »
Il est alors envoyé le 3 juillet 1915 au 27ème bataillon de chasseurs alpins engagé dans l’Aisne, bataillon surnommé « diables bleus » par les Allemands.
Il se porte volontaire pour aller détruire un nid de mitrailleuses. Rampant jusqu’aux tranchées ennemies, il parvient à proximité de la cible, atteint le tuyau de cheminée du poêle autour duquel se pressent les Allemands pour se chauffer et y fait tomber une poignée de grenades. La position est neutralisée : il y a plusieurs morts et les survivants se rendent, croyant être attaqués par un bataillon entier. Albert revient à sa base avec les mitrailleuses et ←←huit prisonniers.
Le 15 octobre 1915, il est distingué comme chasseur de première classe.
Régulièrement en première ligne, il se retrouve un jour être le seul survivant de sa position, une tranchée au sud-est en Alsace, tous ses camarades ayant été tués. Il positionne alors tous les fusils des morts avec lesquels il tire alternativement faisant croire à l’ennemi à la résistance d’une garnison, mettant ceux-ci en déroute.
Volontaire pour des missions de reconnaissance, il est un jour fait prisonnier avec son lieutenant blessé. Isolé dans une casemate→→ lors d’un interrogatoire, il parvient à maîtriser et tuer son interrogateur dont il a subtilisé le pistolet. Ne s’arrêtant pas en si bon chemin, il ramène ←← 42 nouveaux prisonniers et son lieutenant blessé sur son dos.
Lors d’une offensive de la bataille du Chemin des Dames, son capitaine est grièvement blessé et gît entre les lignes. Il rampe alors sous le feu au péril de sa vie pendant six heures pour le rejoindre, puis encore quatre heures pour le ramener avant de le confier aux brancardiers. Épuisé, il s’endort dans un trou de guetteur. Il est réveillé par une patrouille qui le prend pour un déserteur. « Abandon de poste sous le feu, fusillé dans les 24 heures ».
Malgré ses dénégations, sans témoin et en période de mutinerie, il est envoyé au cachot en attente de l’application de la sentence. Il écrit alors à son père « Dans une heure je serai fusillé, mais je t’assure que je suis innocent. ». Il est emmené au ←←peloton d’exécution qui s’apprête à faire sa besogne lorsqu’une estafette l’interrompt : le capitaine est sorti juste à temps de son coma et apporte son témoignage disculpant Albert.
Puis il est cité : « Chasseur dont la bravoure est légendaire au bataillon. Fait preuve, dans les circonstances les plus difficiles d’un mépris absolu du danger ; conserve un calme absolu aux moments les plus critiques, donne à ses camarades l’exemple de l’entrain, exalte leur courage, est pour ses chefs un auxiliaire précieux. Pendant les opérations du 31 août 1918, a réussi comme agent de liaison à transmettre à toutes les sections de sa compagnie les ordres du commandant, n’hésitant devant aucun danger, triomphant des difficultés de toutes sortes, montrant un rare esprit de décision, une conscience au-dessus de tout éloge. Médaillé militaire pour faits de guerre (sept citations). »
Le chasseur Roche est nommé chevalier de la Légion d’honneur le 3 septembre 1918 qu’il reçoit des mains du commandant de l’armée des Vosges, le général de ←←Maud’huy et il est invité à la table du général →→Mangin
Au cours du conflit, il est blessé neuf fois, fait 1 180 prisonniers à lui tout seul. À la fin du conflit, à 23 ans, il est toujours soldat de première classe.
Le 27 novembre 1918, il est présenté au balcon de l’hôtel de ville de Strasbourg par le généralissime Foch→→ devant une immense foule en liesse en ces termes : « Alsaciens, je vous présente votre libérateur Albert Roche. C’est le premier soldat de France ! ». Peu de temps auparavant, Foch avait découvert avec étonnement les états de service d’Albert devant lesquels il s’était écrié : « Il a fait tout cela, et il n’a pas le moindre galon de laine ! ».
Le 11 novembre 1920, il porte, avec sept de ses camarades, le cercueil du ←←Soldat inconnu lors de la cérémonie à l’Arc de Triomphe.
Il fait ensuite partie de la délégation française conduite à Londres en 1925 par le général Gouraud pour assister aux obsèques du Field Marshall Lord French. Il est convié à la table du roi George V avec cinq représentants de l’Armée.
Il retourne ensuite chez lui à Valréas dans le Vaucluse où il travaille modestement comme cantonnier. Il y épouse, en janvier 1921, une fille de Colonzelle de la Drôme voisine.
Il est affecté comme pompier à la poudrerie de Sorgues. En avril 1939, il est renversé à Sorgues par une voiture à sa descente d’autocar. Transporté à l’hôpital Sainte-Marthe d’Avignon, il y décède (voir in fine ↓↓ « similitude » ?) le 14 avril (à « cinq heures » précise son acte de décès), à l’âge de 44 ans.
Édouard Daladier demanda que les honneurs militaires lui soient rendus lors des obsèques. Une semaine après, il transmet un don anonyme de 20 000 francs à sa veuve (soit environ 10 000 euros de 2020).
En 1971, la municipalité de Réauville fait ériger une stèle à sa mémoire devant sa maison natale.
D’abord inhumé à Sorgues, le corps d’Albert Roche est transféré le 22 septembre 1967 au cimetière Saint-Véran d’Avignon, où il repose toujours (carré 40, rangée Nord, tombe 15).
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